• L'Art et la danse

    L'Oiseau de Feu -  Marc Chagall   (détail du plafond de l'Opéra de Paris)

     

     

    "Au plus fort de l'orage il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. C'est l'Oiseau inconnu. Il chante avant de s'envoler"
                                                               René Char (1907-1988)

     

        Après l'immense succès remporté à Paris par sa première saison de ballets, Sergueï Diaghilev décide de renouveler l'expérience l'année suivante avec une oeuvre totalement inédite, et souhaite exporter cette fois une création totalement russe dans son esprit et dans sa forme, encouragé en cela par l'enthousiasme du public français pour cet art slave qu'ils découvrent.

         Le thème du livret sera donc inspiré des légendes russes, et pas moins de quatre compositeurs se verront contactés pour la partition:
        Tcherepnine (1873-1945) tout d'abord, lequel commença effectivement à travailler pour le ballet mais se retira du projet à la suite d'une brouille avec l'irascible impresario (Il publia par la suite sa musique sous le titre Le Royaume Enchanté), puis c'est Liadov (1855-1914) qui se vit ensuite proposer l'offre et la déclina tout simplement, l'idée très répandue selon laquelle il aurait accepté la commande sans pouvoir l'honorer du fait de sa lenteur à composer étant entièrement fausse. Ce ne sera qu'après les refus respectifs de Glazounov ( 1865-1936) et Sokolov (1859-1922) qu'en désespoir de cause Diaghilev se tourne vers le jeune Igor Stravinsky qui était en quelques sortes le suivant sur sa liste, car il s'était adressé par ordre de préférence aux compositeurs qui avaient arrangé les oeuvres de Chopin pour Les Sylphides, le grand succès de la saison 1909 à Paris (Stravinsky avait orchestré le Nocturne en la bémol majeur et la Valse Brillante en mi bémol majeur).

     

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    Igor Stravinsky (1882-1971)

     

        "Faites moi l'imprévisible!" avait réclamé impérativement Diaghilev... Pour Igor Stravinsky alors âgé de 28 ans, il s'agit de concevoir une oeuvre en quelques mois et surtout un ballet pour Fokine, et le projet inspira au départ quelques inquiétudes au jeune compositeur:
        "Diaghilev me proposa d'écrire la musique de L'Oiseau de Feu. Quoiqu'effrayé par le fait que c'était là une commande à délai déterminé, et redoutant de ne pouvoir arriver à temps, j'ignorais encore toutes mes forces, j'acceptais".
        Car son envie de rejoindre les Ballets Russes était en effet plus forte que ses craintes:
        "A l'époque où je reçus la commande de Diaghilev le ballet venait de subir une grande transformation grâce à l'apparition d'un jeune maitre de ballet, Fokine, et à l'éclosion de tout un bouquet d'artistes pleins de talent et de fraicheur. Tout cela me tentait énormément, me poussait à sortir du cercle dans lequel je me trouvais confiné et à saisir l'occasion qui s'offrait de m'associer à ce groupe d'artistes avancés et actifs dont Diaghilev était l'âme et par lequel je me sentais attiré depuis longtemps.
        Pendant tout l'hiver je travaillais avec ardeur à mon oeuvre et ce travail me mettait en contact continuel avec Diaghilev et ses collaborateurs. La chorégraphie de L'Oiseau de Feu était réglée par Fokine au fur et à mesure que je livrais les divers fragments de ma musique".
                           (Igor Stravinsky - Chroniques de ma vie)

     

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    Mikhaïl Fokine (1880-1942)

     

        Commencée en Décembre 1909, la partition achevée le 18 Mai 1910 est divisée en 19 morceaux qui par leurs titres rendent assez bien compte de l'argument lequel s'inspire de plusieurs sources car il n'existe pas de conte ou de légende populaire russe dont l'Oiseau de Feu soit le personnage central.
        Emblème de la magie bénéfique et de la beauté pure dans le folklore russe, cet Oiseau de Feu, insaisissable, vif, radieux était la métaphore parfaite de l'art lui-même tel que le concevait le cercle du Monde de l'Art (Mir-Iskousstva), "l'oiseau libre" de l'inspiration "aux ailes légères et bienveillantes" que célébrait le poète Alexandre Blok (1880-1921) et il s'imposa naturellement aux créateurs.

        Fokine élabora le livret à partir d'une idée judicieuse de Piotr Potiomkine, poète mineur et balletomane qui avait fait son entrée dans le cercle de Diaghilev et avait sans aucun doute en tête certains vers de Iakov Polonski (1819-1898) que tout jeune russe apprend encore par coeur aujourd'hui:
        "Et dans mes rêves je me vois chevauchant un loup
         Le long d'un sentier dans une forêt,
         Parti combattre un tsar sorcier
         Dans ce pays où une princesse captive
         Se lamente derrière des murs épais.
         Au milieu d'un jardin merveilleux s'élève un palais de verre,
         Et un oiseau de feu y chante toute la nuit
         Becquetant sur un arbre des fruits dorés".

        L'intrigue, qui réunit quatre thèmes des contes populaires traditionnels: L'oiseau de feu, le sorcier maléfique, la princesse captive et le prince libérateur, est en fait construite sur la base de deux histoires:
        Le Conte d'Ivan Tsarévitch, de l'Oiseau de Feu, et du loup Gris, l'un des nombreux contes publiés par Alexandre Afanassiev (1826-1871) et La Cithare qui joue seule où apparait cette fois le personnage de Kachtcheï l'Immortel. Certains éléments mineurs ont en outre été également empruntés à d'autres contes tels que Vassilissa la belle ou encore Danses nocturnes et le programme rédigé par les Ballets Russes lors de la création du ballet propose le récit suivant:

        " Ivan Tsarevitch voit un jour un oiseau merveilleux, tout d'or et de flammes, il le poursuit sans pouvoir s'en emparer et ne réussit qu'à lui arracher une de ses plumes scintillantes. Sa poursuite l'a amené jusque dans les domaines de Kachtcheï l'Immortel, le redoutable demi-dieu qui veut s'emparer de lui et le changer en pierre, ainsi qu'il le fit déjà avec maint preux chevaliers. Mais les filles de Kachtcheï et les 13 princesses captives intercèdent et s'efforcent de sauver Ivan Tsarevitch. Survient l'Oiseau de Feu qui dissipe les enchantements: Le château de Kachtcheï disparait et les jeunes filles, les princesses, Ivan Tsarevitch et les chevaliers délivrés s'emparent des précieuses pommes d'or de son jardin".


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    Illustration d'Ivan Bilibine (1876-1942) pour Le Conte d'Ivan Tsarévitch, de l'Oiseau de Feu, et du Loup Gris (1899)


        Toutefois Mikhaïl Fokine élaborera davantage le récit et le ballet en I Acte et deux tableaux peut se résumer brièvement de la manière suivante:
       Le prince Ivan Tsarevitch vient de pénétrer au clair de lune dans une forêt mystérieuse où se dresse un arbre chargé de fruits dorés, et apercevant soudain un oiseau magnifique, l'Oiseau de Feu, réussit à le capturer, mais celui-ci échange sa liberté contre l'une de ses plumes qui saura, lui dit-il, le protéger en cas de besoin.
        Après être parvenu au domaine du sorcier Kachtcheï, Ivan Tsarevitch voit soudain s'ouvrir la porte du château d'où sortent 13 princesses prisonnières qui jouent avec les pommes d'or. Celle de la plus belle d'entre elles, la princesse Tsarevna, s'égare, et en la récupérant elle découvre Ivan qui s'était dissimulé pour observer les jeunes filles.

     

    L'Oiseau de Feu est interprété par Nina Ananiashvili (L'oiseau de Feu), Andris Liepa (Ivan Tsarevitch), Ekaterina Liepa (Tsarevna), Sergueï Petukhov (Kachtcheï) et le corps de ballet du Bolchoï.

     

         Tsarevna raconte alors à Ivan comment le sorcier transforme en pierre les voyageurs qu'il capture et le supplie de s'enfuir, mais tombé amoureux de la belle princesse et n'ayant cure de ses conseils, il voit tout à coup surgir une horde de monstres suivis du sorcier qui s'empare de lui. Il est alors placé contre un mur de pierre et Kachtcheï commence l'incantation qui va le transformer lorsque la plume de l'Oiseau lui revient soudain en mémoire... Il l'agite et celui-ci apparait aussitôt, entrainant les démons dans une danse qui les épuise.

     

    L'Oiseau de Feu est interprété par Nina Ananiashvili (l'Oiseau de Feu), Andris Liepa (Ivan Tsarevitch), Ekaterina Liepa (Tsarevna), Sergueï Petukhov (Kachtcheï) et le corps de ballet du Bolchoï.

     

        L'Oiseau a révélé à Ivan l'existence d'un coffre où est caché un oeuf énorme qui renferme l'âme de Kachtcheï, ce dernier tente d'empêcher que l'on s'en empare mais l'oeuf est finalement brisé et tous les sortilèges sont rompus, le sorcier et ses charmes maléfiques sont anéantis et Ivan et Tsarevna sont finalement réunis.

        Le 7 Juin 1910 Stravinsky se rend à Paris pour assister aux dernières répétitions et y est accueilli en triomphe. "Souvenez vous de ce que je vous dis, c'est un homme à la veille de la gloire" fera remarquer Diaghilev à Tamara Karsavina...
        Et le succès pressenti par tous sera effectivement au rendez-vous malgré quelques moments difficiles... Car lors de la Première à l'Opéra de Paris le soir du 25 Juin, si tout le Gotha des grandes soirées parisiennes est dans la salle (voilée pour ne pas être reconnue Sarah Bernhardt est présente dans son fauteuil roulant), en coulisses par contre rien ne va... La révolte gronde depuis quelques jours chez les techniciens et c'est Diaghilev lui-même qui prendra en main la commande des éclairages...
        Mais trois quarts d'heure plus tard les spectateurs, qui ne se sont aperçu de rien, sont debout et applaudissent à tout rompre Tamara Karsavina (l'Oiseau de Feu), Vera Fokina (Tsarevna), Michel Fokine (Ivan Tsarevitch) et Alexeï Boulgakov (Kachtcheï), quand à Stravinsky, le public voit en lui le nouveau musicien de génie.

     

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    Tamara Karsavina et Mikhaïl Fokine dans L'Oiseau de Feu (1910)

     

        A l'exception des costumes de la princesse Tsarevna et de l'Oiseau de Feu, deux créations éblouissantes de Léon Bakst pleines de couleurs et de pierres précieuses, les décors et les costumes sont d'Alexandre Golovine qui avait conçu à cette occasion avec sa forêt mystérieuse matérialisée par des arabesques multicolores qui semblent répondre à la musique, l'un des plus beaux décors jamais réalisés pour les Ballets Russes, contribuant à donner à l'oeuvre un caractère magique et intemporel. Les critiques seront litéralement en extase et ne cesseront de louer le ballet pour la symbiose entre le décor, la chorégraphie et la musique:
        "Le vieil or du fantastique rideau de fond de scène semble avoir été conçu avec la même formule que celle des miroitements orchestraux" écrira Henri Ghéon dans La Nouvelle Revue Française.

     

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    Décor d'Alexandre Golovine pour L'Oiseau de Feu

     

        Quand au chorégraphe il inaugurait ici la voie du ballet moderne par la dimension expressive de son écriture. Fokine a non seulement cherché à créer dans L'Oiseau de Feu une danse belle, mais aussi dramatique, voire spectaculaire, mettant en évidence les notions de bien et de mal sur lesquelles repose le principe du conte de fée. Et il rompt la tradition en ouvrant ce ballet sur une vision plus réaliste à travers un langage à la fois expressif et moderne:
        "Dans ce ballet j'éliminai totalement la pantomime habituelle et je racontai l'histoire avec l'action et la danse"
                             (M.Fokine- Mémoires d'un maitre de ballet)
        Fokine intègre en effet ici des éléments gestuels du quotidien, et ne craint pas de faire se mouvoir les danseuses allongées au sol lors de la scène finale avec l'Oiseau pour lequel il invente des formes et alterne d'authentiques danses avec leur propre relecture dans une optique moderne.

     

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     Costume de Léon Bakst pour Tamara Karsavina dans L'Oiseau de Feu

     

        C'est Anna Pavlova qui au départ avait été pressentie pour le rôle titre, mais celle-ci refusa absolument de danser sur la musique de Stravinsky qu'elle considérait comme une ineptie... Et ce dernier écrira plus tard:
        "Je la rencontrais chez elle à St.Petersbourg. Diaghilev lui avait demandé de m'inviter à une de ses soirées dans l'espoir qu'après m'avoir rencontré elle accepte de danser L'Oiseau de Feu. Je me rappelle que Fokine et Bakst étaient présents. On a bu beaucoup de champagne... Mais quoi que Pavlova ait pensé de moi, elle ne dansa pas L'Oiseau de Feu. Les raisons de son refus étaient, je crois, qu'elle considérait ma musique comme horriblement décadente".
        Et malgré l'opposition de Vaslav Nijinski qui aurait voulu interpréter L'Oiseau de Feu, ce fut alors Tamara Karsavina qui obtint le rôle.

        Dédicacée "A mon cher ami Andreï Rimsky-Korsakov", la musique de Stravinsky a été utilisée par rien moins que 13 chorégraphes. L'oeuvre fut remontée par les Ballets Russes du colonel Basil à Londres en 1934 avec les costumes et les décors originaux, puis par George Balanchine en 1949 pour le New-York City Ballet avec cette fois des décors et des costumes de Marc Chagall. Repris une nouvelle fois en 1970 par Balanchine et Robbins et des costumes de Barbara Karinska, l'Oiseau de Feu a également inspiré entre autres Serge Lifar, Maurice Béjart ou encore Angelin Preljocaj.


    L'Oiseau de Feu est interprété par Dominico Levré et le Béjart Ballet (extrait du DVD "Vous avez dit Béjart")


        "Me renouveler, surprendre, et ne jamais lasser" telle était l'ambition d'Igor Stravinsky au lendemain du triomphe de L'Oiseau de Feu et c'est effectivement ce qu'il fera avec les deux prochains ballets qu'il composera pour la troupe de Diaghilev, Petrouchka (1911) et Le Sacre du Printemps (1913) qui marqueront un changement de direction dans son approche musicale et dont les réactions qu'ils soulevèrent allèrent de l'enthousiasme le plus délirant au complet scandale...
        Cependant le compositeur garda certainement une affection toute particulière pour l'oeuvre qui l'avait rendu célèbre et au soir de sa carrière c'est avec la Suite N°3 tirée de son premier ballet que lors d'un mémorable concert qu'il dirigea au Royal Festival Hall de Londres en 1965 Stravinsky choisit de faire ses adieux au public anglais sur les ailes de son Oiseau de Feu.


     Igor Stravinsky dirige L'Oiseau de Feu  (Extrait du concert d'adieu enregistré au Royal Festival Hall de Londres en 1965)

     

    "J'ai dit quelque part qu'il ne suffisait pas d'entendre la musique mais qu'il fallait encore la voir"
                            Igor  Stravinsky

     

     


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    "Mother of the World"     Nicolas Roerich (1930)


     

    "A travers l'atmosphère terrestre, des rayons transparents devinrent d'un orange vif et passèrent graduellement par tous les tons de l'arc-en-ciel, des couleurs indescriptibles pareilles à celles des toiles du peintre Nicolas Roerich"
    (Extrait du Journal de Bord du cosmonaute russe Yuri Gagarine - 12 Avril  1961)

     

        Une carrière prodigieuse aux multiples facettes, une sphère d'intérêts sans limites et une profonde intelligence de la beauté sous toutes ses formes, ainsi peut se définir celui qui fut par deux fois candidat pour le Prix Nobel de la Paix, a donné son nom à une planète ainsi qu'à un pic dans l'Altaï et reste en dépit de cela relativement peu connu en Occident.
        Nicolas Roerich naquit le 9 Octobre 1874 à une soixantaine de kilomètres de St.Petersbourg dans le domaine familial d'Ivzara où il passa toute son enfance dans le confort de la haute bourgeoisie russe. Fils ainé d'un avocat, Konstantin Roerich, et de sa femme Maria, le jeune garçon eut l'avantage de cotoyer très tôt la société d'écrivains, artistes et scientifiques que fréquentaient ses parents, et manifesta très jeune, outre de multiples talents, une soif immense de savoir :
       Un ami de la famille l'ayant invité un jour à venir explorer les fouilles qu'il dirigeait dans la région, cette expérience éveilla chez l'enfant alors âgé de tout juste 9 ans une véritable passion pour l'archéologie et les civilisations anciennes qu'il conserva tout au long de sa vie. Il se mit alors à collectionner pièces de monnaie, minéraux, et avide de connaissances dans tous les domaines alla même jusqu'à créer ses propres plantations pour étudier les végétaux.


         Mais adolescent c'est vers le dessin pour lequel il se montrait particulièrement doué qu'il songea sérieusement à s'orienter et dut affronter pour cela les réticences de son père qui souhaitait qu'à son exemple il embrasse une carrière juridique. Un compromis sera cependant trouvé et à l'automne 1893 Nicolas s'inscrivit conjointement à l'académie des Beaux Arts et à l'Université de St.Petersbourg où il fait la connaissance d'un étudiant qui le précédait d'un an ou deux à la Faculté de Droit, Sergueï Diaghilev, qui sera parmi les premiers à apprécier ses talents de peintre et d'archéologue (Pendant ses années d'université Roerich était devenu également membre de la Société Archéologique et dirigea de nombreuses fouilles). 
         Diplômé des Beaux Arts en 1897, Nicolas Roerich va collaborer aux côtés de Diaghilev, Alexandre Benois et Léon Bakst à la revue Mir Iskousstva (Le Monde de l'Art), et 16 de ses toiles participeront à l'exposition organisée à Paris en 1906, inaugurant la fabuleuse aventure destinée à faire connaitre aux européens l'art et la musique russes. 
         Le peintre réalisera ensuite les décors et les costumes d'Ivan le Terrible de Rimsky-Korsakov que Diaghilev fera découvrir aux français en 1909 ainsi que ceux des danses polovtsiennes du Prince Igor de Borodine.

     

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    Décor de Nicolas Roerich pour les Danses Polovtsiennes (1909)

     

        Mais le point culminant de la collaboration des deux hommes sera sans nul doute Le Sacre du Printemps (1913). Les Ballets Russes inauguraient une forme d'art qui impliquait la participation du décorateur parmi les "auteurs", et tout comme Alexandre Benois influença la création de Pétrouchka, Roerich participa de la même manière à la création du Sacre aux côtés d'Igor Stravinsky. Bien que ce dernier prétende avoir eu seul l'idée de l'oeuvre, la genèse du ballet n'est certainement pas étrangère cependant à la passion de Roerich pour les civilisations anciennes et, comme il l'écrivit dans une lettre à Diaghilev,dans "la belle cosmogonie de la terre et du ciel".


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    Décor de Nicolas Roerich pour Le Sacre du printemps (1913)

     

        Mettant en scène les rites primitifs des hommes qui, saluant le printemps source de vie, sacrifient une vierge au dieu soleil Yarilo, aucun ballet n'avait jamais raconté une telle histoire, et tout aussi insolites, la musique de Stravinsky et la chorégraphie de Nijinski provoquèrent une controverse qui dura plusieurs années et dont Roerich donna plus tard sa propre interprétation: 
        "Je me rappelle comment les spectateurs à la Première sifflèrent, hurlèrent si fort que l'on n'entendait rien. Qui sait, peut-être à ce moment là exultaient-ils, pris par la même émotion que les peuples primitifs. Mais disons que ce primitivisme sauvage n'avait rien à voir avec le primitivisme raffiné de nos ancêtres pour qui le rythme, le symbole sacré et la subtilité du mouvement étaient des concepts grands et sacrés".


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    Costumes de N.Roerich pour Le Sacre   Théâtre du Châtelet - Paris (1913)


        Peintre de la couleur pure, peintre de la nature et du sacré qui dialogue avec les mondes subtils, qu'il s'agisse d'un vaste décor ou d'une simple toile, Nicolas Roerich créa une oeuvre qui nous entraine aux portes du Ciel et nous révèle la dimension de l'Infini et du Cosmos.
        "Si Phidias fut le créateur de la forme divine et Giotto le peintre de l'âme, on peut dire que Roerich a révélé l'esprit du Cosmos"
     (Barnett D.Coulon -  Nicolas Roerich, A Master of the Mountain- 1938) 

        Entre 1916 et 1919 il composa un recueil de 64 poèmes, Fleurs de Morya (Flame in Chalice), décrivant son voyage intérieur, et affirmant son engagement dans la recherche spirituelle. Ils évoquent des images reprises plus tard dans ses toiles et aident à comprendre ses tableaux peuplés de symboles et d'allégories devenus un trait essentiel de son oeuvre lorsque Roerich "le prophète" sentant venir le cataclysme  de la Première Guerre Mondiale communiqua dans ses tableaux la terrible ampleur du conflit qui menaçait le monde.
        " Il peuple son monde non pas d'acteurs dans un drame ou une comédie éphémère, mais de porte-paroles des idées les plus constantes au sujet de la vérité de la vie, de la lutte millénaire du Bien et du Mal, et du progrès triomphal vers un avenir radieux pour tous" écrira un critique.

     

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    "The Last Angel"   Nicolas Roerich (1912)

     

        Au coeur des croyances de Roerich réside le concept hindou d'un univers sans début ni fin, qui se manifeste dans la création et la dissolution de formes matérielles en un cycle constamment renouvelé. Sur le plan humain cela signifie l'essor et la chute des civilisations et sur le plan individuel la réincarnation de l'âme.
        " Frères, abandonnons tout ce qui change rapidement. Autrement nous n'aurons pas le temps de réfléchir à ce qui reste inchangé pour tous: A l'éternel ". (Nicolas Roerich -  A Propos de l'Eternel) 

        Accompagné de son épouse, Helena Ivanova, nièce de Moussorgsky et excellente pianiste, philosophe et écrivain, qu'il épousa en 1901 et qui soutint activement et collabora à toutes ses initiatives, il effectua dans les années qui suivirent la guerre plusieurs séjours en Europe et aux Etats-Unis où ses nombreuses expositions lui acquirent une solide réputation dans le domaine de l'art.
        Après Londres où il participe à une nouvelle production du Prince Igor à Covent Garden, c'est l'Art Institute de Chicago qui sollicite ses talents de décorateur pour son Opéra (Grand amateur de musique et de celle de Wagner en particulier Nicolas Roerich créa des décors et des costumes pour la plupart de ses opéras), suivra ensuite New-York, où le Nicholas Roerich Museum ouvrira ses portes en 1923, et où le peintre présente plus de 400 tableaux et fonde le Master Institute of United Arts qu'il dirige en personne.

     

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    "The Red Mountain"    Nicolas Roerich ( Santa-Fé -1921)

     


        Au cours de ces séjours Roerich eut l'occasion de rencontrer des organisations traditionnelles et d'établir des contacts privilégiés avec des responsables de la Société Théosophique, et le couple maintenant établi à New-York envisagea bientôt un voyage vers ces contrées lointaines qui exerçaient sur eux une attraction de plus en plus forte depuis plusieurs années à travers leurs religions, leurs philosophies et leurs légendes.
         Ils portèrent plus précisément leurs regards vers les régions himalayennes, l'Asie centrale, la Mongolie et le Gobi, et en compagnie de sa famille (Il a deux fils, Youri et Svetoslav), Nicolas Roerich quitte les Etats-Unis en Avril 1923, dans le cadre d'une expédition scientifique et artistique qu'il dirige et dont le but est de rassembler des informations sur les cultures des peuples de ces contrées.

         Ainsi qu'il le décrit dans son livre Au Coeur de l'Asie dans lequel il raconte comment ils durent franchir quelques 35 cols entre 4000 et 6500 mètres d'altitude, les conditions de voyage furent parfois très rudes (Ils seront même attaqués au Tibet où "seule la supériorité de nos armes à feu a empêché l'effusion de sang" écrivit-il). Un long périple au cours duquel Roerich peignit environ 500 tableaux, images de l'Asie qu'aucun artiste avant lui n'avait produites, révélant la beauté inviolée de ces régions et les méditations du peintre sur les cimes.

     

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    "Himalaya"   Nicolas Roerich (1933)


        En 1928 les Roerich s'installèrent définitivement aux pieds de l'Himalaya dans la vallée du Kulu et y établirent le siège principal de l'Institut de Recherches Himalayennes "Urusvati" ("Lumière de l'étoile du matin") où furent rassemblés et étudiés les résultats des analyses (botaniques, archéologiques et ethnolinguistiques) recueillis pendant ces 5 années, tout comme le seront ceux des expéditions ultérieures (En 1934-35 Roerich dirigera une expédition en Mongolie, Mandchourie et en Chine) et l'Institut Urusvati communiquera des données aux plus importantes universités et institutions scientifiques d'Asie, d'Europe et d'Amérique.

      

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    Portrait de Nicolas Roerich par son fils Svetoslav

     

         Depuis très longtemps un sujet préoccupait tout particulièrement  Nicolas Roerich, à savoir la protection des trésors culturels, et en 1929 il mit à profit un séjour à New-York pour l'aborder sérieusement et rédiger un Pacte, proposant que tous les endroits protégés selon ses termes soient identifiés par un drapeau distinctif, la Bannière de la Paix, trois sphères magenta contenues dans un cercle de même couleur sur un fond blanc:
        La Religion, l'Art et la Science réunis dans le cercle de la Culture, ou selon une autre interprétation, les accomplissements passés, présents et futurs de l'humanité entourés du cercle de l'éternité.

     

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    "Pax Cultura"   Nicolas Roerich (1931)
      

         Ce signe et la devise Pax Cultura qui l'accompagne symbolisent la vision pour l'humanité qui animait Roerich:
        "Unissons nous. Vous demandez de quelle façon? Vous serez d'accord avec moi: de la façon la plus simple, par la création d'une langue commune sincère... Peut-être dans la Beauté et la Connaissance."
       Présent dans plusieurs de ses tableaux dont la Madone à l'Oriflamme, ce symbole qui existe depuis des temps immémoriaux se rencontre dans le monde entier et personne en conséquence ne peut prétendre  qu'il appartient à une religion, un peuple ou une tradition particulière. On le retrouve entre autres sur des poteries de l'âge néolithique, sur le sceau de Tamerlan, sur des bijoux tibétains, caucasiens et scandinaves, sur des objets byzantins et romains, sur le blason de la ville de Samarkand ou encore le bouclier des Croisées et la Madone de Strasbourg.

     

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    "La Madone à l'Oriflamme"   Nicolas Roerich (1932)

     

        Les efforts de Nicolas Roerich ne furent pas vains et le 15 Avril 1935, en présence du président Franklin Delano Roosevelt, le traité du Pacte Roerich fut signé à la Maison Blanche par les nations des Amériques et les membres de l'Union Panaméricaine, et de nombreuses associations de par le monde continuent aujourd'hui à attirer l'attention sur le contenu de ce traité toujours en vigueur.
        Premier document international dédié à la protection des valeurs culturelles, celui-ci fut également à l'origine de la décision prise en 1949 par l'UNESCO pour la protection de l'héritage culturel en temps de conflit, et en 1954 le Pacte Roerich fut inclus cette fois littéralement dans la base de la Convention de La Haye pour la Protection des Richesses Culturelles en cas de conflit armé.

     

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        Dans un domaine tout à fait différent, il faut également mentionner l'influence (occultisante et néospiritualiste  cette fois) de Nicolas Roerich qui se serait étendue jusqu'aux plus hautes sphères de l'Etat Américain puisque, selon certaines sources, ses théories auraient pesé auprès du Vice-Président Henry A.Wallace concernant le projet d'inclure le sceau des Etats-Unis au verso du dollar américain (La décision finale fut prise par le President Roosevelt en 1935). 

     

    L'Art et la danse

    Bien que la version officielle dise qu'il n'y a absolument aucun symbole occulte sur ce billet on peut arriver à en doute si on l'observe soigneusement: à commencer, entre autres, par les 72 pierres de la pyramide qui représentent les 72 dieux de l'ancien monde, l'oeil omniscient et l'infinité d'éléments en relation avec le chiffre 13 (qui certes peut représenter les 13 états d'origine, mais évoque aussi les tribus perdues d'Israël et revêt la plus grande importance dans certaines sociétés ésotériques).

     

       A la fois peintre de talent, éminent scientifique, archéologue, écrivain et grand explorateur ayant fait sa religion de la recherche de la beauté et de la culture, Nicolas Roerich mourut à Naggar dans la vallée du Kulu le 13 Décembre 1947. Demeuré toute sa vie un patriote convaincu et un citoyen russe, il n'avait jamais abandonné l'idée de rentrer dans sa patrie et avait, juste après la guerre, fait la demande d'un visa pour regagner l'Union Soviétique, mais il s'éteignit sans savoir que celui-ci lui avait été refusé...

     

    L'Art et la danse

    "Song of Shambala"   Nicolas Roerich (1946)


         A sa demande, son corps fut incinéré et ses cendres enterrées face aux montagnes qu'il aimait et qu'il avait peintes si souvent (La série Himalaya comprend plus de 2000 peintures) et l'endroit où fut dressé le bûcher a été recouvert d'une grande dalle rectangulaire sur laquelle ont été gravés ces mots:
        "Ici fut livré au feu le 15 Décembre 1947 le corps d'un grand ami de l'Inde, le Maharishi Nicholas Roerich. Qu'il repose en paix". 


    L'Art et la danse

    Nehru, Indira Gandhi, Nicolas Roerich et M.Yunus


        Plus d'une centaine d'institutions culturelles, académies ou organismes scientifiques de tous pays ont élu le peintre russes parmi leurs membres honoraires, témoignage de la reconnaissance mondiale de celui qui fut également en deux occasions nominé pour le Prix Nobel de la Paix dont une première fois en 1929 par l'Université de Paris.
       Plus ostensiblement peut-être, mais sans doute tout aussi largement méconnus, une planète mineure du système solaire (la planète 4426), découverte le 15 Octobre 1969 par des astronomes d'un observatoire de Crimée, ainsi qu'un pic dans l'Altaï rappellent également symboliquement au monde aujourd'hui le nom de cet homme de culture qui fut aussi poète, linguiste ou encore directeur d'école d'art, un être dont l'étendue et la richesse du génie créatif et des activités furent exceptionnelles et qui pensait que la survie de la planète dépendrait de la venue de la Paix sur Terre...

     

     

        "J'admire tellement votre Art que je peux dire sincèrement sans exagération que jamais aucun paysage n'a produit sur moi une impression aussi grande"
                    Albert Einstein (Lettre à Roerich -1931)

        "Nicolas Roerich est un des piliers de la culture russe"
                     Mikhaïl Gorbatchev 

     

     


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  • L'Art et la danse

    Le Café de Paris  par Jean Béraud (1849-1935) 

     

        Il existerait, parait-il, des bas reliefs egyptiens représentant exactement les mouvements réalisés par les danseurs de cancan, mais ce que l'on peut affirmer de manière plus véridique c'est qu'il existait au XVIème siècle en Bretagne une danse, le Triori, dont les descriptions sont parvenues jusqu'à nous et dans lesquelles les dames dansent seules et exécutent diverses figures en soulevant leurs robes et en levant une jambe. En 1543 Ambroise Paré se souvient d'une fête en Basse Bretagne chez le duc d'Etampes:
        "davantage leur faisoit dancer le triori de Bretagne et n'estoit pas sans remuer les pieds et les fesses" écrit-il.

        Comme nombre de danses populaires, les origines du cancan sont obscures, mais la première mention du môt se trouve dans la description d'une danse répandue par un personnage nommé Chicard qui, s'inspirant des performances du célèbre danseur "disloqué" Charles Mazurier (1798-1828) très connu pour ses acrobaties, aurait mis à la mode dans les années 1820 une sorte de quadrille où les couples à tour de rôle devaient exécuter des figures plus ou moins excentriques dont la dernière, le chahut, ou chahut-cancan ou encore chahut-coin-coin, faisait scandale, les cavalières y soulevant leurs jupes et montrant leurs jambes, un geste considéré comme très osé et très érotique à l'époque (Il semblerait que l'origine du terme de cancan ou coin-coin viendrait de l'imitation de la démarche du canard).
        Jugée dépravée la danse ne fut pas reprise dans les bals de société, mais dans les bals d'étudiants et les bals populaires: La Grande Chaumière, puis le Bal Bullier:
        "Ce fut vers 1822 que les jeunes gens qui se rendaient à la Chaumière commencèrent à danser ce que l'on appela d'abord le chahut et ensuite le cancan... Le cancan néglige, dédaigne, repousse tout ce qui pourrait rappeler le pas, la règle, la régularité de la tenue... C'est encore et surtout le déguingandage des danseurs et des danseuses. Comment de l'état de proscription sociale où il resta pendant 10 ans le cancan put-il passer à l'état public? Comment la police a-t-elle pu permettre de l'exécuter sur les théâtres? C'est qu'en 1830 une révolution s'était accomplie et que comme toutes les choses de son temps le cancan s'était trouvé mêlé à la politique. Chahuter n'était-ce pas encore pour les étudiants et les commis faire de l'opposition au pouvoir?" (A.Delforest- Dictionnaire de la conversation et de la lecture).

     

    L'Art et la danse

    La Liberté Guidant le Peuple (1830)  par Eugène Delacroix (1798-1863) 

     

        Après le bouleversement des "Trois Glorieuses" (27, 28 et 29 Juillet 1830), le nouveau régime, la Monarchie de Juillet, opère une rupture symbolique avec le passé, et prenant comme emblème le drapeau tricolore bleu, blanc, rouge, s'affirme beaucoup plus laïc que son prédécesseur. Les temps ont changé et le Bal Mabille, établissement de danse fondé en 1831 par un professeur de danse du Faubourg St.Honoré, sur l'actuelle Avenue Montaigne à l'époque presque champêtre, va contribuer à répandre largement le cancan. L'endroit était au début réservé aux élèves puis fut ouvert au public, transformé en une sorte de jardin éclairé par 3000 becs de gaz ce qui permit d'ouvrir les lieux le soir et le Bal Mabille devint en peu de temps l'établissement le plus en vogue du Paris de l'époque. Mais bien que toléré maintenant le cancan n'en avait cependant pas perdu son parfum licencieux et un garde municipal, surnommé "le Père La Pudeur" y veillait à ce que les figures restent dans une certaine décence allant jusqu'à arrêter les contrevenants pour "attentat aux moeurs" (Il faut mentionner pour une meilleur compréhension de l'histoire que les femmes portaient encore à cette époque des culottes fendues).

     

    L'Art et la danse

    Le Bal Mabille  par Jean Béraud (1849-1935)

     

         En 1850, Céleste Mogador, une célébrité du Bal Mabille, imagine le "quadrille naturaliste", dont la dernière figure, le "cancan excentrique" (huit minutes à couper le souffle sur des airs entrainants de la musique festive de danse de Paris au XIXème siècle) s'inspirait cette fois très largement des danses des blanchisseuses de Montmartre qui autant pour séduire leurs fiancés que pour montrer leur savoir-faire exhibaient fièrement à profusion leurs jupons affriolants.

       Il ne s'agit cependant encore à l'époque que d'une danse de couple exécutée dans le cadre d'un bal populaire, mais à mesure que les danseurs devinrent de plus en plus habiles, le cancan développa une existence parallèle comme spectacle au Moulin de la Galette et à l'Elysée-Montmartre. Un rythme endiablé, de l'équilibre et de la souplesse à la limite de l'acrobatie, les danseuses de l'époque étaient plutôt des demi-mondaines et seulement semi-professionelles au contraire de ce que seront celles des années 1890 comme la Goulue ou Jeanne Avril.


    L'Art et la danse

    Quadrille à l'Elysée Montmartre

     

         En s'inspirant de cette danse, un entrepreneur de spectacle londonien, Charles Morton, inventa dans les années 1860 une nouvelle forme de spectacle qui fit scandale à Londres et qu'il nomma le French Cancan, lequel fut rapidement interdit, les danseuses laissant évidemment apparaitre, comble de l'érotisme, leur culotte et leurs jarretières.
        Alors que dans les cabarets parisiens le cancan restait encore dansé en couple, individuellement, ou en groupe, la version anglaise introduisit le style typique des spectacles de music-hall anglo-saxons, la "chorus line", une rangée de danseuses qui exécute des mouvements d'ensemble, et ainsi relooké  et rebaptisé Outre Manche le French Cancan fera encore jusqu'à aujourd'hui à Paris le bonheur des touristes venus du monde entier...

     

    L'Art et la danse

    Affiche "Art Nouveau" de Bonot

     

        Les règles du cancan étaient, par le fait de son appartenance à la culture populaire, assez souples et il n'y avait d'ailleurs pas d'école spécifique, hormis celle de Grille d'Egout (ainsi nommée à cause de ses dents très espacées) qui ouvrit ses portes à Montmartre en 1885.
        Malgré la variété des styles, des figures principales par contre s'installèrent durablement: la roue, le grand écart etc.. On peut aussi citer celles dont le nom est issu du vocabulaire militaire: le port d'armes, la mitraillette, l'assaut, le pas de charge, ou des jeux d'enfants: le saute mouton, les petits chiens. L'ensemble restant d'ailleurs uniforme, une danse quasi exclusivement féminine basée sur le célèbre rond de jambe.

        Le Moulin Rouge qui ouvrit ses portes en 1889 en devint très bientôt le symbole et lui fit cette fois franchir le pas entre bal populaire et haute société. Ayant entendu parler du succès des quadrilles à l'Elysée Montmartre et au Moulin de la Galette, Joseph Olier (inventeur du PMU et fondateur de l'Olympia) et son acolyte Charles Zidler eurent effectivement l'idée, avec le succès que l'on connait, d'offrir dans leur établissement le dépaysement de cette danse sulfureuse à une clientèle huppée venue s'encanailler grâce à de faux truands ou de fausses prostituées (Il y avait cependant souvent dans le lot de vrais truands et de vraies prostituées qui consentaient à être les figurants d'un soir afin de suppléer à leurs revenus réguliers).

     

    L'Art et la danse

    Le Moulin Rouge en 1889

     

        Les danseuses y auront pour nom Grille d'Egout, Jane Avril qui contrairement à La Goulue et à la plupart de ses consoeurs danse avec pudeur, Nini Pattes en l'Air, Sauterelle ou encore la Môme Fromage ainsi nommée à cause de son jeune âge.

     

    L'Art et la danse

    Jeanne Avril par Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901)

     

        Dans leurs costumes affriolants elles font perdre la tête au Tout-Paris cristallisant l'image d'une société parisienne frivole proche de celle décrite caricaturalement dans La Vie Parisienne d'Offenbach avec les musiques duquel le cancan sera de plus en plus associé. La provocation mêlée de complicité fait fureur et les bas noirs, jarretelles et frou-frous prennent des noms très imagés. Considéré par certains comme symbolisant une première ébauche de libération sexuelle de la femme qui est cette fois celle qui séduit, le cancan peut être vu par d'autres comme un simple aspect annexe et spectaculaire de la prostitution comme le soulignent quantité de caricatures et de textes du XIXème siècle souvent de manière très appuyée. Le Guide des Plaisirs de Paris de 1898 donne cette description des danseuses:
        " Une armée de jeunes filles qui sont là pour danser ce divin chahut parisien avec, comme sa réputation l'exige, une élasticité lorsqu'elles lancent leur jambe en l'air qui nous laisse présager d'une souplesse morale au moins égale..."
        Nini Pattes-en-l'Air fera, quand à elle, cette remarque à ses consoeurs:
    " Les filles, votre jupon c'est votre drapeau, votre épée, votre bouclier, et le grand écart mène à tout!".
        Pratiqué avec des figures de plus en plus provocantes et des dessous toujours plus affriolants, il faut cependant mentionner que c'est un mythe de croire que le cancan était dansé sans caleçons... (Cette légende ayant été peut-être propagée par les photos très révélatrices pour lesquelles posa La Goulue et dont certaines causèrent, il faut l'avouer, un véritable scandale).

     

    L'Art et la danse

    Le quadrille du Moulin Rouge en 1900. De gauche à droite: Cadudja, la Môme Fromage, Serpolette (grand écart), Nini Pattes en l'Air, la Sauterelle, Casque d'Or, la Goulue, Rayon d'Or.

     

         Rares sont les danseurs masculins dont les noms sont passés à la postérité, un groupe, le Quadrille des Clodoches se produisit dans les années 1870, mais le seul personnage a être véritablement devenu célèbre reste Valentin le Désossé, de son vrai nom Jacques Renaudin, un être cauchemardesque aux bras et aux jambes de caoutchouc mince comme un fil, partenaire de La Goulue de 1890 à 1895 au Moulin Rouge et immortalisé par Toulouse-Lautrec (Valentin le Désossé souffrait en réalité du syndrome d'Ehlers-Danlos, une maladie génétique caractérisée entre autres par une hyperlaxité des articulations).

     

    L'Art et la danse

    Le Bal du Moulin Rouge par Henri de Toulouse Lautrec (Valentin le Désossé est représenté face à la danseuse)


     

         Depuis ses débuts la popularité de cette danse ne s'est pas démentie et s'est largement exportée de la Russie aux Amériques. En Amérique du Nord elle est surtout interprétée dans les cirques, les carnavals, les fêtes d'anniversaires et de remises de diplômes. Et pour l'anecdote il faut mentionner la chaine de supermarchés ShopRite, dont la maison mère est dans le New Jersey, qui utilise le cancan pour animer ses soldes bisanuelles de produit en conserve et qui a célébré en Janvier 2011 le 40ème anniversaire de ses "Can-can Sales"! ( Savoureux jeu de môt... En anglais le substantif "can" signifie "boite de conserve"...)

     

    L'Art et la danse

     

        Le cancan est apparu à plusieurs reprises dans le ballet, entre autres dans La Boutique Fantasque  (1919-Musique de Rossini arrangée par Respighi) ou La Gaité Parisienne (1938-Musique d'Offenbach adaptée par Manuel Rosenthal) deux oeuvres de Léonide Massine, ou encore La Veuve Joyeuse (Musique de Franz Lehar adaptée par John Lanchbery) chorégraphié par Ronald Hynd pour l'Australian Ballet.
        En 1954 Cole Porter compose sa comédie musicale Can-can dont s'est inspiré Walter Lang pour son film du même nom en 1960, mais l'une des oeuvres cinématographiques les plus populaires est peut-être French- Cancan, le film de Jean Renoir très librement inspiré des biographies des fondateurs du Moulin Rouge où l'on retrouve aux côtés de Jean Gabin, Françoise Arnoul, Claude Berri et Edith Piaf.


    Extrait du film de Jean Renoir French-Cancan (1954)

      

        Danse emblématique du patrimoine chorégraphique français, le cancan qui a élargi le champ des libertés et fait sauter les verrous de la société bourgeoise du XIXème siècle est toujours présent dans le monde du spectacle où porté par une musique explosive il est l'image même de la joie de vivre:
        "J'observe le début du cancan. La vue des robes rouges qui volent, embrasant la scène de leurs flammes provocantes, le froissement des jupons qui frétillent de manière ostentatoire, les cris stridents des filles qui chauffent la salle m'aspirent irrésistiblement. Ivre d'une excitation communicative je suis sous l'empire d'une folie furieuse et joyeuse".                    
                   (Nadège Maruta - Follement Cancan     Editions du Rocher)                                                                                         

        Et aux côtés de la baguette de pain, du camembert, du litre de vin ou du béret basque (cf. l'épicier de la réclame de ShopRite à qui, il faut le remarquer, a été malgré tout épargné le reste du "costume" de "français moyen" généralement imposé par la mythologie touristique étrangère avec le Marcel et la paire de bretelles...), ce symbole du "Gai Paris" n'est pas prêt de disparaitre de la liste des stéréotypes entretenus par les tour-operators de tous horizons...

     

     

     


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    L'Art et la danse

    La Goulue entrant au Moulin Rouge    Henri de Toulouse-Lautrec

     

        

        Louise Weber naquit à Clichy (Hauts de Seine) le 12 Juillet 1866 dans une famille d'origine alsacienne. A la mort de sa mère, c'est sa soeur ainée Marie- Anne, blanchisseuse, qui s'occupe de ses trois frères et soeurs, et Louise alors âgée de 12 ans fera sa communion solennelle vêtue d'un tutu et de chaussons de satin empruntés à une acrobate de cirque de leur connaissance, un costume peu orthodoxe qui provoque déjà sa part de scandale...
        Afin de contribuer aux besoins de la maisonnée la jeune Louise vend alors des fleurs dans les passages, mais sa passion c'est la danse et à 16 ans elle se rend tous les soirs dans les bals de banlieue à l'insu de sa soeur, élégamment habillée de toilettes "empruntées" aux clientes de la blanchisserie... Son talent de danseuse et ses manières audacieuses (elle n'a pas sa langue dans sa poche) la font immédiatement remarquer, et très vite elle se forge une réputation de forte fille rieuse qui possède l'art et la manière de répondre aux hommes... La danseuse Céleste Mogador qui a lancé le quadrille au Bal Mabille perçoit ses capacités et lui prodiguant leçons et conseils la fait débuter au cirque Fernando puis au Moulin de la Galette.

        C'est Charles Destenque, un journaliste qui tenait dans la revue Gil Blas une rubrique réservée à la promotion des demi-mondaines, qui l'y découvre :
        "Ma veine m'a conduite au Moulin de la Galette où j'ai rencontré Charles Destenque qu'on appelait Vide Bouteille", confiera-t-elle plus tard,
    ce dernier l'emmène alors au Grand Véfour où elle découvre éblouie la haute société:
        "Ah mes enfants! quelle soirée! Tous ces messieurs en habit avec des favoris et des monocles! Ils m'ont fait danser et boire du champagne! Ils me mettaient des louis dans les cheveux, dans mes souliers, partout. Ce fut ma première sortie dans le monde chic".
            (Propos recueillis en 1910 par le chroniqueur Michel Georges Michel)

        Les hommes vont se pâmer devant elle, pourtant Louise Weber n'est pas ce que l'on qualifie de spécialement "belle"... Mais elle possède un charme irrésistible... "La Goulue, elle n'était pas jolie, elle était pire!" dira un critique de celle à qui son penchant à vider les fonds de verres et les bouteilles attira ce surnom imagé. Car ce qui fit sa personnalité c'est cette gouaille parisienne avec son accent des faubourgs, et son répondant et sa spontanéité seront la source de l'étonnement mais aussi de l'admiration de toute une cour dont firent partie les intellectuels et les artistes qui devinrent ses amis.
     

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    La Goulue  Photo de Louis Victor Paul Bacard (Musée d'Orsay Paris)

        

        Elle fait la connaissance à cette époque d'Auguste Renoir à qui elle sert de modèle et rencontre également au Moulin de la Galette, Charles Zidler et Joseph Oller lesquels immédiatement séduits l'engagent sur le champ pour animer leur Bal du Moulin Rouge qu'ils projettent d'ouvrir Place Blanche.
        Les lieux sont inaugurés le Dimanche 6 Octobre 1889, et du jour au lendemain la Goulue deviendra la reine de la sensualité parisienne, dirigeant "le chahut", figure du "quadrille naturaliste", le célèbre "cancan" qui fera la gloire de l'établissement.
        Poussant l'excentricité à l'extrême, alors que le chapeau est obligatoire pour toutes les danseuses, elle est la seule à danser sur les tables "en cheveux", montrant à qui veut le voir le joli petit coeur brodé sur son caleçon...  Et ses admirateurs, des messieurs bien sous tous rapports qu'elle taquine par le tourbillon de ses jupes à volants relevées, sont au comble du ravissement lorsqu'elle leur retire prestement le chapeau du bout de son pied migon... (Les propriétaires de l'établissement n'appréciant pas véritablement ces familiarités décidèrent de séparer les danseuses des clients, et l'un d'eux fut parait-il si furieux de ces nouvelles dispositions qu'il cassa deux bouteilles sur la tête de Zidler...)

     

    L'Art et la danse

     La Goulue  au Moulin Rouge 

       "Je gagnais 800 francs par mois, ça me valait encore des cachets chez tous les princes de Paris et des tournées à l'étranger. Car je faisais partie du Grand Quadrille avec Grille d'Egout, qui est concierge maintenant, la Sauterelle qui tient un bistrot à Reims, et Nini Patte en l'Air! Ah, je crossais!" se souviendra-t-elle .
       Lorsqu'elle loue un somptueux hôtel particulier Avenue des Champs Elysées, la Goulue est effectivement la star la mieux payée du moment et affiche en public un caractère insupportable, circule en voiture attelée (le grand chic à l'époque), arrive aux répétitions en tenant une petite chèvre en laisse, et pose nue pour des photos dont certaines très osées feront scandale...
     

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      Hôtel particulier de Louise Weber Avenue des Champs Elysées

     

         Quand à son vocabulaire il fait frémir, et l'on affirme qu'il aurait fait rougir un escadron de gardes municipaux: Louise Weber qui alliait la grâce physique et la vulgarité des manières et du langage, n'hésitait pas en effet à tutoyer les notables venus s'encanailler dans les cabarets à succès et elle apostrophera même un jour sans vergogne le Prince de Galles, futur Edouard VII en ces termes très peu protocolaires:
        " Hé, Galles! Tu paies l'champagne? C'est toi qui régales ou c'est ta mère qui invite?"
     

    L'Art et la danse

    La Goulue (à gauche) et Grille d'Egout. Photo de Louis Victor Paul Bacard (Musée d'Orsay Paris)

         Et tous les soirs, assis au premier rang non loin du bar, un petit homme au corps atrophié observe son modèle favori... Car Montmartre, La Goulue et Henri de Toulouse Lautrec sont historiquement indissociables... Louise Weber sera l'un des sujets de prédilection du peintre et il l'immortalisera dans ses portraits et ses affiches pour le Moulin Rouge aux côtés de Valentin le Désossé.

     

    L'Art et la danse

    La Goulue et Valentin le Désossé    Affiche de Toulouse- Lautrec

     

         La reine du "cancan" apprécie visiblement le travail de l'artiste qui sait que la fête n'est qu'apparence et que derrière les belles robes et les couleurs se dissimule l'infamie de la vie, et leur complicité sera telle que chaque Vendredi elle est admise rue Toulaque dans l'atelier où le peintre reçoit ses amis. "Il me grandit!" disait-elle malicieusement de celui qu'elle appelait affectueusement "le petit homme touffu" ou encore "mon petit bonhomme".

        Menant un train de vie dispendieux, exigeant des cachets toujours plus considérables, la Goulue faisant l'erreur de croire que sa seule personne suffit à attirer le public, décide alors de quitter le Moulin Rouge afin de monter un spectacle à son compte. Elle investit à cet effet une fortune dans une baraque foraine et le 6 Avril 1885 adresse la lettre suivante à Toulouse-Lautrec:
        "Mon cher ami, je serai chez toi le 8 Avril à 2 heures de l'après-midi. Je serais bien contente si tu avais le temps de peindre quelque chose sur ma baraque. Elle est au Trône. Je suis placée en entrant à gauche. J'ai une très bonne place. Tu me diras où il faut que j'achète mes toiles. Je te les donnerai dans la journée même".


    L'Art et la danse

    La danse au Moulin Rouge   Toile de Lautrec pour la baraque de la Goulue


        Lautrec réalisera effectivement les toiles demandées, mais l'aventure se révèlera malheureusement un échec cuisant pour la Goulue dont ce sera le début de la déchéance et d'une lente descente aux enfers car, souffrant de dépression elle va alors se tourner irrémédiablement vers la boisson.
        On la retrouve en 1899 à l'affiche de la ménagerie d'Adrien Pezon où elle danse au milieu de 4 lions amorphes, un numéro qui parait-il frisait le ridicule. Mais s'étant familiarisée avec les fauves, elle décide d'apprendre le métier et après s'être perfectionnée dans l'art du dressage se produit avec la ménagerie Laurent avant de voler de ses propres ailes. 
         José Roxler, un ancien prestidigitateur qu'elle a épousé en 1901 lui a offert en effet quelques fauves en cadeau de mariage et ensemble ils ouvrent une ménagerie que l'on retrouvera sur la plupart des fêtes parisiennes, les Invalides, la fête de Neuilly, Montmartre ou la foire au pain d'épices, en passant par Vaugirard et le Parc de Saint-Cloud où en 1904 elle sauve la vie de son mari alors que celui-ci est attaqué par un puma, un évènement qui fit la une du "Petit Journal" et contribuera à sa légende. 

     

    L'Art et la danse


        Lorsque son fils Simon (né en 1895 de père inconnu) a l'âge de les rejoindre dans la cage elle le présente comme "le plus jeune dompteur de l'époque, champion de la cravache d'or", (il a tout juste 10 ans...) mais nous sommes au début du XXème siècle, les ménageries foraines rencontrent de moins en moins de succès et les affaires périclitent. Le couple dans le même temps part à la dérive mais la Goulue n'en continuera pas moins de tourner jusqu'à la guerre avec des animaux faméliques et de moins en moins nombreux.
     

    L'Art et la danse

    La Goulue  en 1905 avec son fils Simon 

     

        L'arrêt des fêtes en 1914 signera finalement son déclin, son mari meurt à la guerre et on la retrouve plus tard ici ou là dans une baraque annonçant: "Ici la Goulue du Bal du Moulin Rouge". On la verra revêtir son habit de dompteuse jusqu'en 1923, année de la disparition de son fils chéri qu'elle surnommait "Bouton d'Or", et la pauvre Louise s'enfonce alors complètement cette fois dans la déchéance.

        Amie de Rétoré, chiffonier et brocanteur au marché aux puces de Saint-Ouen, elle vit aux beaux jours dans une roulotte installée en bordure d'un terrain vague, revenant en hiver vers Montmartre où elle possède son logement boulevard Rochechouard, contre le cabaret la Cigale.
        La Goulue, devenue "madame Louise", vit maintenant dans la misère et la solitude, entourée d'une cour de rejetés de la société avec ses chats et son chien Rigolo, recueillant les animaux de cirque malades. Elle flâne sur la Butte où elle reste une figure pittoresque et attachante, signant ses photos à ceux qui la reconnaissent au hasard de ses virées dans les bars et les cafés, et pour le plaisir de rencontrer encore le beau monde elle va devant l'entrée du Moulin Rouge où se produit Mistinguett, vendre des cacahuètes, des cigarettes et des allumettes.
     

    L'Art et la danse

    Le Moulin Rouge en 1920   

     

         Souffrant de rétention d'eau, la femme obèse qu'elle est devenue est méconnaissable. En 1925, Georges Lecombe la filme à l'improviste dans "la Zone"... Sur ces images prises quelques années avant sa mort elle est déjà bien malade, mais on perçoit malgré tout encore le charme de son sourire. 
     


        Frappée dans sa roulotte par une attaque d'apoplexie, elle décède à l'Hôpital Lariboisière le 29 Janvier 1929 et sera enterrée au cimetière de Pantin presque sans témoins car, hormis la présence de Pierre Lazareff, attaché à la direction du Moulin Rouge, seule sa famille et quelques forains l'accompagneront jusqu'à sa dernière demeure.

        Synonyme de French Cancan et de Moulin Rouge, et première vedette à inaugurer la scène de l'Olympia fondé par Joseph Oller en 1893, lorsqu'elle s'éteignit au soir de ce destin pathétique, celle qui connut l'enfer demanda à Dieu "un petit coin de Paradis"...
        Les hommes, quand à eux, finirent par lui rendre l'hommage qu'elle mérite grâce à son arrière petit-fils, l'artiste peintre, journaliste et écrivain, Michel Souvais.
     

    L'Art et la danse


        Elle sera exhumée en 1992 et le maire de Paris, Jacques Chirac, ordonne le transfert de ses cendres au cimetière de Montmartre, une cérémonie à laquelle assistèrent cette fois devant tous les médias plus de 2500 personnes... Mieux vaut tard que jamais pour celle qui fut un jour la reine de Paris... 

     

     

     Il faut remarquer que les arrangeurs se permettent souvent de renommer de manière abusive French-Cancan ce Galop Infernal issu d'Orphée aux Enfers, car le French Cancan (d'origine anglaise, dérivé du cancan original) n'existait pas encore à l'époque où Jacques Offenbach composait.


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